Blog - Marketing is Dead
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Le marketing vu de Séoul

Hyung-Rae travaille chez Delitoon en France, mais partage son temps entre Paris et Séoul.

MarketingIsDead : Tu es directeur des contenus et de la plateforme Delitoon : tu peux nous en dire un peu plus sur cette startup et ta mission ?

Hyung-Rae : Delitoon est la première plateforme de webtoon (bande-dessinée nativement en ligne, avec pour spécificité d’être en « scrolling » vertical – c’est-à-dire – une lecture verticale de haut en bas ; le rendant extrêmement adapté à la lecture mobile), créé en fin d’année 2015. Elle est première dans son secteur, notamment en termes de CA, loin devant les acteurs traditionnels du marché.

Delitoon propose un modèle économique atypique, qui diffère radicalement des principaux modèles présents sur le marché, en s’abstenant de proposer un modèle par abonnement, mais un modèle freemium, inspiré du monde des jeux vidéos. Les utilisateurs s’inscrivent gratuitement sur la plateforme et peuvent lire une partie des contenus gratuitement. S’ils souhaitent continuer, ils peuvent acheter des packs de coins, avec un tarif unitaire dégressif selon la quantité. Puis, chacun est libre de dépenser les coins de son portefeuille pour accéder à un épisode payant. 

Ce modèle comporte plusieurs avantages : un calcul des partages des droits plus justes et plus clairs ainsi que de mettre un « prix » sur un bien culturel numérique. En effet, avec la prolifération des abonnements dits « illimités », beaucoup de personnes ont perdu la notion de valeur sur les contenus qu’elles consomment. De plus, les abonnements illimités ne permettent pas un partage équitable entre la plateforme de diffusion et les producteurs/créateurs. Avec ce modèle, le partage est simple : un achat d’épisode va produire un chiffre d’affaires qui va être partagé avec l’ensemble des acteurs en jeu.

La grande question que l’on peut se poser par rapport à ce modèle est sa viabilité. Je pense que le modèle a fait ses preuves en Asie, plus particulièrement en Corée du Sud, mais également le Japon, la Chine ou encore à Taïwan ou en Indonésie. Le modèle rencontre également un énorme succès aux Etats-Unis en ce moment même avec les principaux acteurs du secteur s’efforçant à exporter leurs succès.

Depuis la création de Delitoon, j’ai pu accompagner son développement en commençant par les bases : le modèle économique ainsi que les aspects englobant le financement, les business plan, le marketing, la communication mais également tous les aspects éditoriaux (prise de contact avec les ayant-droits, négociation des droits, mise en place des flux éditoriaux (localization process)), ainsi que la programmation et les promotions au sein de la plateforme.

Dans ce cadre, nous avons pu travailler avec un budget extrêmement important essentiellement tourné vers le marketing digital, et plus particulièrement, tourné vers les contenus. En effet, ma conviction et notre conviction a été que ce qui intéresse réellement nos lecteurs, ce sont les contenus que l’on propose. C’est notre plus grande porte d’entrée et c’est ce qui fait notre force. Ainsi, nous avons capitalisé la majeure partie de notre budget sur les contenus et nous nous sommes attachés à faire en sorte que les utilisateurs puissent « goûter » nos séries. Cela a été une stratégie gagnante, nous permettant d’acquérir un maximum d’utilisateurs en très peu de temps.

Sur la programmation et les promotions, nous pouvons dire que ce sont deux points qui sont extrêmement importants dans la mécanique économique de la plateforme. En ayant une publication hebdomadaire d’un nouvel épisode toutes les semaines, cela permet et donne un rendez-vous régulier à nos lecteurs, qui ont à présent une raison de revenir très régulièrement. Cela permet également de « lisser » le chiffre d’affaires sur une semaine et d’avoir un point de contact régulier avec le client, nous permettant de « travailler » afin de lui adresser une offre ou lui faire découvrir de nouvelles séries.

Par exemple, si une personne suit une série par jour, cela signifie que cette personne se connectera potentiellement au moins une fois par jour, signifiant que nous faisons partie du quotidien de cette personne. De plus, avec les différentes mécaniques développées et présentes sur la plateforme, s’inspirant des jeux « freemium », même si la personne n’est pas acheteuse, nous tentons à chaque instant de donner une raison de se connecter et d’utiliser nos services.

En résumé, mon rôle est non seulement de recruter de nouveaux utilisateurs, de les convaincre, de leur donner envie de consommer nos contenus mais également, de leur donner une raison de rester sur la plateforme, par l’intermédiaire des différentes mécaniques ainsi que les promotions, afin de continuer leurs expériences de lecture avec nous.

MarketingIsDead : Tu es expert en marketing, mais en plus tu possèdes une double culture française et coréenne : en quoi le marketing vu de Séoul diffère-t-il du marketing vu de Paris ?

Hyung-Rae : En soit, les objectifs sont similaires dans les deux pays : que ce soit l’acquisition, le remarketing ou la communication de marque, il n’y a pas de différence. Je pense que la principale différence réside dans la volonté, voire l’acharnement, des coréens à être de plus en plus efficaces. Tous les moyens sont bons afin d’atteindre un niveau de ROI satisfaisant et les marketers ne se contentent pas d’être sur la « moyenne du marché ».

Pour cela, il y a une règle fondamentale qu’il faut respecter : toutes les actions doivent être mesurables et mesurées, et avoir un objectif précis (KPI). Par exemple, dans le cas de Delitoon, les campagnes digitales ont pour objectif de se centrer sur l’acquisition de nouveaux utilisateurs. Pour ce faire, nous nous basons sur le CPA (Cost per Action) que nous mesurons via différents outils (propres ou proposés par les régies publicitaires), par campagne ou par série. L’idée étant d’analyser en temps réel les impacts ainsi que les résultats macro et micro que nous pouvons observer pour prendre une ou plusieurs décisions en accord avec les derniers. Le processus de Test & Learn est donc perpétuel et en temps réel. Par la suite, nous en tirons les leçons afin de déterminer et de décliner les éléments qui fonctionnent.

Je pense également qu’une grande différence se situe sur la réactivité et la prise d’opportunités. En effet, le marketing coréen est extrêmement réactif aux événements et opportunités qui surgissent dans le paysage. Ainsi, les entreprises n’hésitent pas à s’accaparer d’événements qui peuvent paraître mineurs, notamment tout ce qu’il peut se dérouler dans les réseaux sociaux. Dès la découverte d’une tendance sur les réseaux, les différentes campagnes sont adaptées dans les heures qui suivent afin de « coller » au mieux et de profiter de ces opportunités. Toutes les opportunités sont bonnes à prendre : ce dernier permet de soulever un dernier point concernant l’ambiance en général autour du marketing en Corée – l’agressivité marketing est beaucoup plus forte à Séoul qu’à Paris. 

Cette agressivité peut-être perçue de plusieurs manières mais la principale se situe dans le fait que toutes les actions sont coordonnées et faites pour « faire du chiffre » et la compétition est féroce afin d’attirer l’attention des prospects. Cependant, ceci est un vaste sujet qui mérite d’être traité indépendamment.

MarketingIsDead : Revenons aux startups … et à leur nécessaire adolescence : comment passe-t-on d’une démarche de type Growth Hacking à des formes plus classiques d’acquisition et à un marketing de marque ?

Le terme de Growth Hacking est vaste, cependant, en soi, je pense que cette méthode est utilisée par toutes les entreprises qui font du marketing. Cependant, quand on regarde le Growth Hacking sous le spectre des startups, c’est un moyen permettant aux entreprises de sortir du lot et de dépasser ses concurrents. Delitoon, depuis ses racines, a intégré la notion de growth hacking, dès la mise en place du business plan et donc, de la stratégie et la direction prise par l’entreprise. La clé était de mettre l’ensemble des compétences de l’entreprise vers une seule et même direction :: la croissance. Cela sous-entend, bien entendu, que l’ensemble des acteurs impliqués travaille avec un objectif commun et une vision partagée – cela est beaucoup plus facile dans une structure de type « startup » qu’une entreprise de taille plus importante.

L’un des buts du Growth Hacking est de trouver les solutions les plus efficientes en termes de coût/investissement. Comme j’ai pu l’évoquer un peu plus en haut, une fois qu’une solution viable est trouvée, on revient sur une démarche beaucoup classique de test & learn, puis d’application des méthodes. Chez delitoon, nous avons utilisé le growth hacking pour accélérer la croissance dans les premières phases : atteindre et acquérir le plus rapidement que possible notre cœur de cible. Cela nous a permis de prouver au marché que le modèle économique proposé par notre plateforme est solide, permettant aux investisseurs d’être rassurés sur l’avenir de l’entreprise.

Une fois ces objectifs de persuasion et de démonstration atteints, nous nous sommes tournés vers une communication et un marketing beaucoup plus classique afin, cette fois, mettre en place une stratégie d’extension du marché, c’est-à-dire, aller au-delà du cœur de cible, étendre le marché de manière à trouver un second souffle dans la croissance de l’entreprise. Cette phase est toujours en cours et, si jusqu’à maintenant, nous avons eu le souhait de nous concentrer sur ce que notre cœur de cible aime – nos contenus –, nous souhaitons rediriger la communication vers une communication plus globale portant sur la marque. Nous pensons que c’est là où nous pouvons trouver un second souffle pour notre croissance.

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Philippe Rondeau et la grande rébellion des consommateurs

Le marketing a trop souvent considéré les consommateurs comme des cibles taillables à merci, pourvu qu’on leur propose des produits et/ou services à peu près adaptés à leurs besoin … sauf qu’aujourd’hui, ça marche de moins en moins – voire plus du tout selon les populations à qui on s’adresse : la grande rébellion des consommateurs, c’est maintenant et partout !

Quelle forme prend-elle ? Comment en est-on arrivé là ? Quels secteurs sont les plus touchés ? Quelles solutions pour les marques ? Et sur quoi tout cela va-t-il déboucher ?

Toutes ces questions, le Club Horizon(s) de l’Adetem les a posées le 4 Mai dernier à un panel d’expert ; retour sur cet événement avec Philippe Rondeau, Responsable Marketing de Sodebo, et membre du Conseil Scientifique de l’Adetem.

MarketingIsDead : Les Français se montrent de plus en plus critiques vis-à-vis des initiatives, même « citoyennes », des marques, tu en as vécu la difficile expérience chez Sodébo …

Philippe Rondeau : Les Français sont paradoxaux. Ils le sont individuellement mais la société française est aussi une société de paradoxes, pour ne pas dire une société de fractures. Ainsi les contraintes et les aspirations des uns ou des autres sont très différentes selon le lieu d’habitation (en ville, en périphérie, en zone rurale), sa situation économique, sont statut familial… Les marques qui pour la plupart sont issues des 30 Glorieuses et ont comme vocation de s’adresser à l’ensemble de la population dans une logique de consommation de masse, se trouvent face à un « archipel » qui devient impossible à adresser de façon pertinente. Les initiatives prises par les marques sont donc de plus en plus « segmentantes » donc excluant ainsi une partie de la population qui les critique vertement. Les marques tergiversent, essaient de trouver un juste milieu, font preuve de pédagogie afin d’expliquer leurs efforts pour assurer cette nécessaire transition mais le résultat n’est pas souvent à la hauteur des attentes et les consommateurs pointent immédiatement du doigt les incohérences criantes entre le discours et les actes.

Il devient très difficile pour les marques de valoriser leurs avancées « citoyennes » sans être accusées de « greenwashing », de « social washing » ou pire… D’ailleurs dans une étude récente l’institut KANTAR notait que moins de 10% d’un panel de 530 marques alimentaires étaient jugées comme « responsables » de la part des consommateurs !

MarketingIsDead : Bref, c’est la défiance qui s’installe envers les marques, tandis qu’apparaissent de nouveaux « tiers de confiance » ?

Philippe Rondeau : Effectivement, face à des marques qui ne semblent pas comprendre et répondre à leurs problèmes, les consommateurs cherchent des réponses ailleurs. La confiance se construit désormais à travers les discussions entre consommateurs et via de nouveaux tiers, qui ne se présentent pas comme des acteurs économiques mais comme des initiatives citoyennes au service des citoyens. Le boom des applis s’est construit sur ce principe. Les marques sont exclues de ces nouveaux échanges, elles n’en sont plus les actrices, juste les objets, sans avoir le moyen d’y prendre part. Ainsi la relation directe essentielle que les marques entretenaient avec les consommateurs s’étiolent.

MarketingIsDead : Et de nouveaux comportements se développent …

Philippe Rondeau : Forcément ! Les marques ayant de moins en moins la capacité à influencer les comportements de consommation faute de crédibilité, la consommation se réoriente vers de nouveaux standards en rupture avec ceux « du monde d’avant » : circuits courts vs grande distribution, produits locaux vs grandes marques internationales… Mais un autre comportement progresse également qui vise à optimiser son pouvoir d’achat : fréquentation de solderies, pratiques anti-gaspillage… Les marques « historiques » se retrouvent écartelées entre des phénomènes comportementaux très différents mais dont le point commun est une critique d’un modèle, comme une distanciation consommatoire qui s’installerait dans les pratiques des français après la distanciation sociale imposée par la Covid.

MarketingIsDead : Quelles perspectives ? Comment les marques peuvent-elles s’en sortir ?

Philippe Rondeau : En période de crise, les marques retrouvent un rôle important de repère et de réassurance. Dans un monde chahuté et incertain, les consommateurs cherchent aussi à se raccrocher à ce qui est connu et pérenne. Les marques et leur histoire apportent cette réassurance. La crise révèle aussi la place essentielle de la consommation. S’il y a une forme de mise en questionnement de la consommation, celle-ci conserve un rôle social fondamental. Les marques restent des marqueurs sociaux et permettent une forme de réalisation sociale.

Les marques ne sont donc pas vouées à disparaitre mais si elles veulent jouer leur rôle cela va nécessiter d’être beaucoup plus exigeant sur la cohérence entre les discours et les actes et de trouver la manière non plus de s’adresser à tous mais de s’adresser à chacun. C’est avec ces efforts que les marques réussiront à se réconcilier aux consommateurs rebelles.

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Domotique : Big Brother Google is watching you

Pour régler à distance la pompe à chaleur de ma maison, je me suis récemment équipé d’un système domotique Google Nest Learning Thermostat, 3ème Génération … Ouf, ça c’est de la marque !

Système facile à installer : dans mon cas, un câble (non fourni) vers le réseau 220 volts, et un second (non fourni) à connecter au « contact sec » de la régulation de la pompe ; et un chargeur, avec câble mini-USB (non fournis) pour alimenter le thermostat distant.

Histoire de vous faire peur ( ?), Google vous avertit : « Courant haute tension. Nous vous recommandons de faire appel à un professionnel pour l’installation de votre thermostat Nest »  … pour le cas où ne vous sentiriez pas capables de relier un appareil à une prise ou au tableau électrique de votre foyer : un peu l’impression d’être pris pour un con !

Ensuite, tout communique, le thermostat avec le relai chaudière d’un côté, avec la box Internet de l’autre, puis l’interface Web et l’appli Smartphone, via votre compte Google … tiens, je vais encore lui fournir des données : simple, très simple !

Ensuite, vous tourner le cadran du thermostat pour choisir la température désirée … et c’est tout : Google se charge du reste … hélas !

Je me positionne sur 22,5° – je suis un peu frileux – et découvre le lendemain un thermostat réglé sur … 23° : zut, j’ai fait une fausse manœuvre ?

Que nenni ! Le Google Nest Learning Thermostat, 3ème Génération est programmé en standard sur le système d’auto-programmation Nest Sense qui « utilise une combinaison de capteurs et d’algorithmes pour recueillir des informations sur vos habitudes et sur les caractéristiques de votre maison ».

Bref, sans vous avoir spécialement demandé votre avis, Google vous flique allègrement, et modifie le fonctionnement de votre chaudière parce qu’il sait mieux que vous ce dont vous avez besoin ; vous pouvez toujours aller trifouiller dans les paramètres pour corriger le tir … mais Google table sur le fait que la plupart des utilisateurs lambda négligeront de le faire.

Comme lesdits besoins peuvent être plus larges, Google vous propose toute une suite de produits de domotique, des enceintes et écrans, aux caméras et serrure, en passant par les détecteurs de fumée, etc. : autant d’objets connectés ou connectables qui, grâce à leur « combinaison de capteurs et d’algorithmes » sauront mieux que vous ce qu’il vous faut ; tout autant de données qui vont partir on ne sait trop où, pour votre plus grand bonheur (j’en doute) et pour le plus grand bénéfice du géant américain (ça j’en suis sûr).

Big Brother n’est pas en marche : il est déjà là avec Google !

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À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #7

7ème et dernier épisode de ma contribution à L’Horrificque Disputatio, ouvrage collectif des Mardis du Luxembourg.


3 semaines plus tard

Trois semaines plus tard, Niels quittait enfin Paris pour Montcuq.

Sa dernière soirée parisienne, il l’avait passée avec dans un petit cinéma de la Rive Gauche spécialisé dans la science-fiction de la fin du 20ème siècle, pour voir un vieux film de Terry Gilliam, Brazil.

L’histoire d’un bureaucrate bien terne qui, suite à une erreur administrative, se retrouve accusé d’espionnage pour avoir sauvé la vie de la femme qu’il aime … dans ses rêves ! Dans cette dictature rétro-futuriste, les chimères se transforment bien vite en cauchemars … 

Arrêté, torturé, mais ne pouvant rien avouer – normal, il ne sait rien, il est juste victime des circonstances –, il s’évadera in extremis de cet enfer grâce à l’intervention d’un résistant – d’un terroriste pour les autorités – et retrouvera l’amour de sa vie : happy end !

Happy end … pas vraiment : en réalité, il ne s’évadera que … dans la folie !

La scène finale lui revenait sans cesse en tête : après son évasion de la chambre d’extermination de la prison, Sam Lowry, le héros, arrive enfin dans une vallée ensoleillée – le repère des rebelles ; bizarrement, le visage de ses bourreaux se superpose au paysage … et l’on retrouve un Sam béat, attaché sur son siège de torture, le regard à jamais fixe …

Le public – surtout les jeunes – raffolait de ces dystopies qui les plongeaient dans un univers bureaucratique et étouffant pas si éloigné de leur quotidien : la France, l’Europe, le monde entier se transformait en une vaste dictature larvée ; une manière sans doute de conjurer leurs angoisses, en se disant qu’il y a toujours pire. Nettement pire !

Une autre façon de fuir un quotidien trop pesant.

Heureusement, si les gouvernants se montraient toujours aussi peu capables à résoudre les problèmes sanitaires, les entreprises avaient su d’adapter, adoptant souvent des comportements presque … vertueux : « presque », parce qu’en réalité, elles y trouvaient très concrètement leur intérêt.

Généralisation du télétravail, par exemple : d’une part, cela évitait de voir leurs locaux devenir des clusters infectieux ; et puis des employés aussi isolés se montraient moins sensibles aux sirènes syndicales ; enfin cerise sur la gâteau, le système leur permettait de réaliser de très substantielles économies de locaux.

Relocalisation de la production – pas nécessairement sur le territoire national, mais dans un rayon écologiquement « acceptable » de 1000 à 2000 kilomètres, ce qui incluait toute l’Europe, mais aussi l’Afrique du Nord : les consommateurs acceptaient désormais de payer un peu plus cher les produits bénéficiant d’un petit label vert « transport responsable » … et on évitait la concurrence asiatique ou indienne !

D’importants secteurs se restructuraient très rapidement : ainsi la stricte application, puis l’élargissement, d’anciennes directives européennes relatives à la protection des données, avaient sapé sur le vieux continent l’hégémonie des Google et autres Amazon ; et si le transport aérien apparaissait définitivement sinistré, le ferroviaire bénéficiait du renouveau du ferroutage.

Comme toujours, de tels bouleversements apportaient leurs lots de gagnants et de perdants, tant au niveau des entreprises qu’à celui de leurs salariés : car tous ne bénéficiaient pas du même « confort » de travail : si les cadres comme Niels tiraient un réel profit du travail à distance, les ouvriers, eux, redécouvraient les affres des trois-huit généralisés qui permettaient de conserver une nécessaire distanciation sociale en usine … pas très gai !

Pour un employé autonome comme Niels par contre, l’avenir s’annonçait presque « bipolaire » – enfin métaphoriquement parlant : on aurait pu aussi le qualifier de totalement incertain, imprévisible, chaotique … quantique ? L’avers et le revers d’un même monde.

Côté pile, une sorte de dictature à peine larvée, et son lot d’oukases : interdictions de se retrouver à plus de 5 – ou 10, ou 12, ou 3 selon les jours et les lieux – dans l’espace public, couvre-feu plus ou moins tardif, transports en commun strictement régulés selon les plages horaires, permis de circuler, etc. Et son lot de sanctions : amende, annulation des permis de circuler, travaux d’intérêt général plus ou moins exposés et dangereux, etc.

Côté face, un espace privé acceptable, sinon agréable … dans les limites d’un certain confinement, bien entendu !

Donc à Paris et dans les grandes métropoles, où les virus circulaient – ou étaient censés pouvoir aisément circuler – la claustrophobie pouvait rapidement gagner ; mais pas à la campagne, où la vie semblait presque « normale », les pandémies n’existant guère qu’à la télévision et au travers des médias sociaux.

Des hordes de cadres avaient fui les zones trop urbanisées, et il devenait difficile de trouver une maison à louer ou à acheter même dans les hameaux les plus reculés de la Lozère ou de la Creuse – inversement le marché de l’immobilier parisien s’était effondré ; et tout ce petit monde télétravaillait dans son jardin.

Tout n’était pas nécessairement si rose, et même dans ces régions l’avenir demeurait incertain : on avait vu des villages soudain totalement confinés, des expulsions administratives plus ou moins motivées – sans oublier l’hostilité croissante des ruraux.

Mais globalement, l’avenir ne s’annonçait pas si désagréable pour Niels : Albertine l’attendait à Montcuq, et aucune ombre ne semblait planer au-dessus de leurs têtes.

Carpe diem … et après moi, le déluge !

600 kilomètres – la quasi-totalité, 550 kilomètres, par autoroute – et 6 bonnes heures de conduite : en partant très tôt le matin, il pouvait espérer arriver vers midi pour déjeuner dans les Causses – il pourrait sortir du côté de Rocamadour, se balader un peu en montagne, trouver un petit restaurant traditionnel …

Après, il improviserait : il délaisserait certainement l’autoroute pour rejoindre Albertine à Montcuq, s’imaginant parcourir les derniers kilomètres depuis Cahors face à l’Ouest et au soleil … un peu comme un pauvre cowboy solitaire, loin de son domicile !

Un peu comme Sam Lowry, aussi : en fait, il ne savait plus trop vers quoi – ou qui – il se dirigeait … le bonheur, sans doute … la folie, peut-être … une Albertine souriante, espérait-il … ou encore un mélange de tout ça, dont il faudrait bien se dépatouiller !

Finalement, à l’Ouest, toujours rien de nouveau … juste tout et son contraire … et pour longtemps, sans doute !

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À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #6

6ème épisode de ma contribution à L’Horrificque Disputatio, ouvrage collectif des Mardis du Luxembourg.


3 semaines plus tard

Trois semaines plus tard, Niels quittait Paris pour Montcuq – un peu plus de 600 kilomètres et une dizaine d’heures par les départementales à en croire son GPS : il évitait les autoroutes, ennuyeuses et chères ; surtout elles étaient réservées aux voitures non polluantes – électriques, hydrogène – et lui ne possédait qu’une vieille hybride.

Après Fontainebleau, il décida de suivre la vieille Nationale 7, si chère à Charles Trenet – son père aimait bien écouter ces vieux chanteurs de « l’après Guerre », comme Trenet ou Bécaud, le fameux « Monsieur 100 000 volts » :

« De toutes les routes de France d’Europe
« Celle que j’préfère est celle qui conduit
« En auto ou en auto-stop
« Vers les rivages du Midi
« Nationale 7 ».

L’atmosphère lui rappelait, non pas « l’après Guerre », mais plutôt la débâcle de Juin 40 … sauf que là, on ne savait pas trop devant quoi on fuyait !

Bien sûr son père, ni même son grand-père, n’avait vécu cette période, mais il se souvenait de vieilles archives cinématographiques qu’il avait vues un jour à la télévision – sur Arte, lui semblait-il ; ces longues files de gens à pieds qui avançaient en tirant des charrettes pleines d’objets hétéroclites.

Les fuyards de 40 s’en virent butter contre la ligne de démarcation, après avoir s’être égarés sous les mitrailleuses de la Luftwaffe ; traumatisés, parfois coupés de ceux avec qui ils étaient partis, ils croisaient à leur retour vers le Nord ceux qui espéraient encore trouver refuge dans le Sud !

Le gouvernement de Vichy, soucieux d’accélérer accélérer les retours, établit un plan de rapatriement avec points de ravitaillement et gîtes d’étape ; ici, rien de tel : ceux qui fuyaient vers le Nord croisaient sans leur accorder un regard, ceux qui espéraient un sort meilleure vers le Sud – et vice versa …

Là, rien n’était ordonné, ni dans une direction, ni dans une autre : ça grouillait dans tous les sens, un peu comme dans Les raisins de la colère … quoique dans le roman de Steinbeck, les gens espéraient retrouver l’Eldorado vers l’Ouest.

Mais c’était les mêmes regards vides, sans réel espoir, ceux de types qui ont tout perdu, qui crèvent de faim et qui savent qu’in fine, il n’y a rien au bout de la route … mais qui font comme si, pour conserver une raison d’avancer, ne pas se coucher au bord de la route et attendre …

Attendre … rien, sinon la mort, sans doute.

Les pandémies avaient tué des centaines de milliers d’entreprises et des millions d’emplois ; et les rares à avoir profité de la crise – les rois du e-commerce et de la livraison à domicile, Amazon et autres Uber – n’embauchaient pas : le premier avait totalement robotisé ses immenses entrepôts et le second avait déployé en temps record, ses gigantesques flottes de camions totalement autonomes.

Pour tous ces fuyards, il n’y avait rien au bout du chemin : même pas une pièce de la main de ceux qui avaient encore un job, mais vivaient dans l’angoisse de le perdre.

La nuit, ils allaient voler le blé à peine mûr dans les champs et souvent des bagarres éclataient avec les comités d’autodéfense des agriculteurs – on ne retrouvait pas toujours les corps …

Des associations caritatives organisaient des distributions de repas, la plupart financées par les pouvoirs publics – mais bien insuffisamment : la dette publique était déjà abyssale, le gouvernement puisait sans cesse dans les nouvelles lignes de crédit que lui accordaient l’Europe, le FMI et surtout le Nouveau Fond International contre les Pandémies.

Les plus jeunes, eux, se réfugiaient dans les jeux vidéo : pas de ces vieux jeux de fantaisie où il faut tuer des dragons pour passer au niveau supérieur, ni ces jeux violents pleins de gangsters et autres pirates.

Non, des jeux très proches de la vie de tous les jours – et complètement immersifs, avec casques de réalité virtuelle et combinaisons sensorielles ; le plus populaire s’appelait OTRA – pour « On The Road Again », on entendait en fond sonore un vieux blues datant de … 68, d’un groupe américain totalement inconnu, Canned Heat, mais totalement envoutant !

L’action se situait dans la France actuelle – et il existait bien sûr une version par pays, mais pas d’internationale : depuis longtemps, on évitait de passer les frontières. C’était un jeu hyperréaliste : on se fixait un point de départ et un autre où arriver, un itinéraire et un moyen de locomotion.

Niels s’était choisi une vieille Toyota hybride, ce qui lui interdisait les autoroutes … mais il n’y avait pas beaucoup d’aventure, sinon quelques malfrats sur le parking des restoroutes ; alors que le long des nationales, il pouvait se passer tant de choses.

Le jeu était à la fois simple et compliqué ; le problème essentiel état qu’on arrivait rarement – ou plutôt jamais – à destination.

Ni dans le jeu : il y avait toujours un dernier obstacle infranchissable, même pour se rendre de la Madeleine à la Concorde.

Ni dans la réalité : les accros à OTRA ne bougeait plus guère de chez eux, ce qui arrangeait bien les gouvernements : ils ne risquaient plus de propager les virus !

Niels n’était pas prêt d’arriver à Montcuq …

3 semaines plus tard

Trois semaines plus tard, Niels hésitait toujours à quitter Paris pour Montcuq.

Certes, il avait bien envie de rejoindre Albertine dans le Quercy, d’autant que la vie à Paris devenait particulièrement insupportable.

Certes le confinement général avait été levé en France, mais le virus continuait de circuler dans le monde, notamment en Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient, un Moyen-Orient où la pandémie se cumulait avec une reprise du terrorisme : les gouvernements locaux avaient beau imposer des mesures sanitaires drastiques, personne ne les respectait ! Quant aux hôpitaux, déjà encombrés de blessés, ils pouvaient difficilement accueillir de nouveaux patients.

D’où de nouveaux flux de migrants, et des foyers de contamination qui apparaissaient sporadiquement dans une Europe qui croyait avoir évité le pire …

Paris avait connu – et connaissait encore – plusieurs alertes, notamment le long du canal Saint-Martin, entre Jaurès et le jardin Villemin, avec pour conséquence un couvre-feu à 20 heures pour les 10ème et 19ème arrondissements, l’obligation de porter un masque dans la rue, etc.

Sur les Champs Elysées aussi, le port du masque était obligatoire, de même que dans bien d’autres lieux fréquentés par les touristes, mais pas seulement : les pouvoirs publics, soucieux de ne pas se voir un jour condamner pour laxisme – une cour spéciale avait été créée pour traiter ces multiples actions en justice, après les premières plaintes visant naguère Édouard Philippe et Agnès Buzyn –, multipliaient les décisions dans l’urgence, parfois de manière contradictoire : il n’était pas rare que deux ministres se contredisent, ou se fassent rabrouer par le Premier d’entre eux !  

Dans les transports en commun, c’était juste le bordel absolu : certaines lignes, comme la 1 ou la 13, n’étaient accessibles à certaines heures qu’aux porteurs de justificatifs – employeurs, médecins –, certaines stations demeuraient fermées aux mêmes horaires – mais la liste changeait sans arrêt … bref, le bordel absolu !

On ne comptait plus les chauffeurs de bus agressés parce que refusant de laisser monter des passagers sans masque ; inversement, une femme enceinte avait été violemment frappée dans une laverie du Val-d’Oise parce qu’elle refusait de porter le sien : le lendemain, une manifestation de soutien avait été organisée, prônant le libre choix … qui s’était heurtée, Place de la République, à un rassemblement revendiquant l’inverse.

La vie parisienne devenait intenable et pourtant Niels hésitait à partir, à cause de son job ; certes le gouvernement préconisait le télétravail chaque fois que possible – et Niels, community manager, pouvait aisément exercer sa profession à distance – mais de nombreuses entreprises faisaient de la résistance, craignant des baisses de productivité …

Productivité, croissance, retour aux bénéfices, etc. : on était bien loin des beaux discours qui avaient suivi le Covid-19 ! 

A l’époque on évoquait un « Monde d’après » totalement différent où santé, épanouissement personnel et bien sûr environnement devaient guider la nation – et non plus la seule réussite économique ; et s’il n’était plus possible de proposer un job convenable à tous, un revenu universel viendrait au secours des laissés pour compte des crises sanitaires et économiques …

Foutaises : une nouvelle génération d’économistes avait prêché « l’Urgence Réaliste », seule issue aux catastrophes qui avaient frappé ce début de millénaire : si l’économie ne redémarrait pas coute que coute, c’en était fini de la belle civilisation occidentale … quitte à laisser des millions de citoyens sur le bord de la route.

Ubérisation et robotisation étaient les maîtres mots des adeptes ce des nouvelles théories : quand on ne pouvait remplacer les gens pas des AI, on utilisait des « Kleenex » – des indépendants sans protection sociale, qui n’avaient d’autres droits que de bosser et se taire.

Niels, lui, bénéficiait encore d’un « vrai » job : mal payé, mais salarié !

Il bossait chez lui, dans son petit studio de banlieue : les frais de connexion Internet étaient à sa charge, un logiciel espion contrôlait qu’il était bien scotché à son clavier, etc. Mais deux matinées par semaine, il lui fallait se rendre à La Défense pour accomplir exactement les mêmes tâches au siège de son entreprise.

Juste un fil de plus à la patte … mais il avait un « vrai » job !

Non, Niels n’irait pas rejoindre Albertine à Montcuq …

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À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #5


Fausse alerte

Il était resté 3 semaines dans son petit appartement près de la Butte aux Cailles. Heureusement il pouvait lézarder sur son balcon qui donnait sur un petit square, puisque comme les précédentes la nouvelle pandémie avait frappé au printemps, du moins en Europe.

Enfin « avait frappé », pas vraiment : le virus n’avait pas daigné voyager jusqu’à l’Atlantique, il était resté en Chine ! Mais dès l’apparition des premiers cas dans l’Empire du Milieu, les gouvernements européens avaient immédiatement verrouillé leurs frontières et décrété le confinement général de leurs populations … pour rien !

Mais on est jamais trop prudent …

Le confinement général … enfin, pas vraiment : car depuis la précédente pandémie, de nombreuses tribus s’étaient mises à enfreindre si ouvertement la loi que les ministères concernés avaient hésité, puis renoncé, à l’appliquer : impossible de lutter à la fois contre la maladie et des émeutes à répétition.

Une part importante de la société s’était marginalisée – ou plutôt, une multitude de groupuscules avaient émergé, vivant en quasi autonomie par rapport au pouvoir central complètement dépassé, acculé à accepter l’inacceptable … du moins d’un point de vue strictement sanitaire.

Lors de la 3ème pandémie, ces rebelles restaient aisément identifiables et localisables : jeunes dealers des banlieues qui ne voyaient pas pourquoi renoncer à leurs commerce pour une société à qui ils ne devaient rien ; struggle for life des adeptes des petits boulots, souvent dans les mêmes zones ; envie soudaine de décompresser de bobos parisiens, une bouteille de bière à la main le long du canal Saint Martin.

La police intervenait rapidement, et malgré quelques rares échauffourées, tout rentrait rapidement dans l’ordre.

On n’en était plus là : des tribus rebelles émergeaient çà et là – génération spontanée – pour disparaître tout aussi naturellement et mystérieusement, aussi bien dans le « Neuf Trois » que dans le XVIème, tant dans les quartiers nord de Marseille que sur la Croisette.

Pire, les mêmes individus qui le matin narguaient l’autorité en se promenant bras dessus, bras dessous, une canette de bière à la main dans les jardins publics, les mêmes individus dénonçaient le soir même ces salopiots qui le matin narguaient l’autorité … Le tout et son contraire, et le chat de Schrödinger qui trottinait gentiment dans les rues !

Les personnes âgées et/ou à risque, quant à elles, avaient anticipé le mouvement : certaines ne mettaient quasiment plus le nez dehors depuis longtemps, elles ne sortaient plus que la peur au ventre, même pendant ces périodes de répit où plus aucun virus ne circulait – mais comment en être sur ?

Bref, de ce côté, tout paraissait plus simple … si ce n’est que de temps en temps, un de ces ultra-confinés pétait les plombs et sortait un vieux fusil pour tirer sur les rebelles qui passaient sous ses fenêtres : des fois que le virus grimperait quelques étages pour s’inviter chez lui !

3 semaines plus tard

Trois semaines plus tard, les gouvernements se congratulaient d’avoir évité une nouvelle catastrophe sanitaire sans trop creuser la dette publique, et levaient les confinements.

Trois semaines plus tard, Niels quittait Paris pour Montcuq – un peu plus de 600 kilomètres et une dizaine d’heures par les départementales à en croire son GPS : depuis longtemps, il évitait les autoroutes et leurs policiers tatillons, sans oublier les petits malfrats qui pullulaient sur les aires de repos.

Enfin, c’est ce qui se disait sur les médias sociaux ; le Ministère de l’Intérieur, lui, démentait régulièrement, mais les mêmes vidéos, virales, tournaient sur les réseaux : compliqué de se faire une idée.

Parfois Facebook ou Twitter en supprimaient quelques-unes, qui revenaient tout aussitôt : en fait, ces derniers adoptaient plutôt profil bas sur la question …

Bien loin le temps où un Zuckerberg agacé argumentait sur sa propre page pour dénoncer les Fake News, ainsi le 19 Janvier 2018 : « Il y a trop de sensationnalisme, de désinformation et de polarisation dans le monde aujourd’hui ». Avec pour solution hypocrite de … restreindre la part accordée aux médias classiques sur la timeline des socionautes !

Il y avait des villes, des territoires à éviter : Génération Française – un groupuscule fascisant, né au lendemain de la 4ème pandémie, et prônant un nationalisme sanitaire – tenait certains cantons du Nord de la France, avant de se développer dans le Berry … allez savoir pourquoi ? Réservé aux « purs aryens » (= aux bons à rien).

Inversement, mieux valait contourner les terroirs tenus par les adeptes du Djihad Sanitaire si l’on n’était pas immédiatement identifié comme un vrai croyant … et encore, on courrait toujours le risque d’apparaître déviant : chaque religion avait ses fous de Dieu, qui se lançaient dans des guerres saintes particulièrement mortelles.

A côté les simples zones de non droit où fourmillaient malfaiteurs en tous genres pouvaient paraître comme plus « sûres » … relativement !

La désinformation régnait sur les médias sociaux, des recettes miracles contre les pandémies – Donald Trump n’avait-il pas ouvert la voie en suggérant des injections d’eau de Javel contre le Covid-19 ? – à la dénonciation d’individus malveillants, soupçonnés d’avoir facilité la dissémination des virus.

Son GPS indiquait les lieux à éviter, un peu comme jadis les radars : Niels suivait les indications à la lettre, multipliant les détours.

Il avait soigneusement évité Fontainebleau, repère de catholiques ultras réputés intransigeants et dangereux, les forêts du Gâtinais et ses coupe-jarrets, les villages entre Nemours et Montargis, extrêmement risqués – mais il ne savait plus trop pourquoi – pour se retrouver à Saint-Amand, supposée aux mains des djihadistes …

C’était juste une Fake News, il aurait dû s’en douter ; et il déjeuna paisiblement dans vieux routier à la sortie de la ville. Il avait encore 5 à 6 heures de route, et le Millevaches à traverser, aussi ne s’attarda-t-il pas trop à table ; et comme il en avait plus qu’assez de perdre son temps pour rien, il décida de ne plus tenir compte des alertes de son GPS.

Il traversa Guéret – repère intégriste, attention ! –, Bourganeuf – repère djihadiste, attention ! –, avant de s’enfoncer dans le Millevaches, pour s’octroyer une petite pause au bord du lac de Vassivière dont d’ordinaire – ou plutôt jadis – les bords attiraient des nuées de touristes ; mais aujourd’hui, quel calme !

Il se gara près du Sentier des Poètes, pour une courte balade à pieds, histoire de se dégourdir les jambes : certes sur son GPS clignotait un gros panneau de danger, mais il décida de ne pas en tenir plus compte que tous les précédents.

Fatale erreur : car en perturbant une transaction entre trafiquants de drogues et dealers, il devenait un témoin gênant ; et en ces temps et lieux de non-droit, la vie des témoins gênants ne valaient pas grand-chose.

Il pensa que tout n’était pas nécessairement des Fake News sur les médias sociaux et ailleurs …

Fatale erreur !

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