À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #5 - Marketing is Dead
26414
post-template-default,single,single-post,postid-26414,single-format-gallery,ajax_fade,page_not_loaded,,select-theme-ver-2.3,wpb-js-composer js-comp-ver-4.5.3,vc_responsive
 

À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #5

À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #5


Fausse alerte

Il était resté 3 semaines dans son petit appartement près de la Butte aux Cailles. Heureusement il pouvait lézarder sur son balcon qui donnait sur un petit square, puisque comme les précédentes la nouvelle pandémie avait frappé au printemps, du moins en Europe.

Enfin « avait frappé », pas vraiment : le virus n’avait pas daigné voyager jusqu’à l’Atlantique, il était resté en Chine ! Mais dès l’apparition des premiers cas dans l’Empire du Milieu, les gouvernements européens avaient immédiatement verrouillé leurs frontières et décrété le confinement général de leurs populations … pour rien !

Mais on est jamais trop prudent …

Le confinement général … enfin, pas vraiment : car depuis la précédente pandémie, de nombreuses tribus s’étaient mises à enfreindre si ouvertement la loi que les ministères concernés avaient hésité, puis renoncé, à l’appliquer : impossible de lutter à la fois contre la maladie et des émeutes à répétition.

Une part importante de la société s’était marginalisée – ou plutôt, une multitude de groupuscules avaient émergé, vivant en quasi autonomie par rapport au pouvoir central complètement dépassé, acculé à accepter l’inacceptable … du moins d’un point de vue strictement sanitaire.

Lors de la 3ème pandémie, ces rebelles restaient aisément identifiables et localisables : jeunes dealers des banlieues qui ne voyaient pas pourquoi renoncer à leurs commerce pour une société à qui ils ne devaient rien ; struggle for life des adeptes des petits boulots, souvent dans les mêmes zones ; envie soudaine de décompresser de bobos parisiens, une bouteille de bière à la main le long du canal Saint Martin.

La police intervenait rapidement, et malgré quelques rares échauffourées, tout rentrait rapidement dans l’ordre.

On n’en était plus là : des tribus rebelles émergeaient çà et là – génération spontanée – pour disparaître tout aussi naturellement et mystérieusement, aussi bien dans le « Neuf Trois » que dans le XVIème, tant dans les quartiers nord de Marseille que sur la Croisette.

Pire, les mêmes individus qui le matin narguaient l’autorité en se promenant bras dessus, bras dessous, une canette de bière à la main dans les jardins publics, les mêmes individus dénonçaient le soir même ces salopiots qui le matin narguaient l’autorité … Le tout et son contraire, et le chat de Schrödinger qui trottinait gentiment dans les rues !

Les personnes âgées et/ou à risque, quant à elles, avaient anticipé le mouvement : certaines ne mettaient quasiment plus le nez dehors depuis longtemps, elles ne sortaient plus que la peur au ventre, même pendant ces périodes de répit où plus aucun virus ne circulait – mais comment en être sur ?

Bref, de ce côté, tout paraissait plus simple … si ce n’est que de temps en temps, un de ces ultra-confinés pétait les plombs et sortait un vieux fusil pour tirer sur les rebelles qui passaient sous ses fenêtres : des fois que le virus grimperait quelques étages pour s’inviter chez lui !

3 semaines plus tard

Trois semaines plus tard, les gouvernements se congratulaient d’avoir évité une nouvelle catastrophe sanitaire sans trop creuser la dette publique, et levaient les confinements.

Trois semaines plus tard, Niels quittait Paris pour Montcuq – un peu plus de 600 kilomètres et une dizaine d’heures par les départementales à en croire son GPS : depuis longtemps, il évitait les autoroutes et leurs policiers tatillons, sans oublier les petits malfrats qui pullulaient sur les aires de repos.

Enfin, c’est ce qui se disait sur les médias sociaux ; le Ministère de l’Intérieur, lui, démentait régulièrement, mais les mêmes vidéos, virales, tournaient sur les réseaux : compliqué de se faire une idée.

Parfois Facebook ou Twitter en supprimaient quelques-unes, qui revenaient tout aussitôt : en fait, ces derniers adoptaient plutôt profil bas sur la question …

Bien loin le temps où un Zuckerberg agacé argumentait sur sa propre page pour dénoncer les Fake News, ainsi le 19 Janvier 2018 : « Il y a trop de sensationnalisme, de désinformation et de polarisation dans le monde aujourd’hui ». Avec pour solution hypocrite de … restreindre la part accordée aux médias classiques sur la timeline des socionautes !

Il y avait des villes, des territoires à éviter : Génération Française – un groupuscule fascisant, né au lendemain de la 4ème pandémie, et prônant un nationalisme sanitaire – tenait certains cantons du Nord de la France, avant de se développer dans le Berry … allez savoir pourquoi ? Réservé aux « purs aryens » (= aux bons à rien).

Inversement, mieux valait contourner les terroirs tenus par les adeptes du Djihad Sanitaire si l’on n’était pas immédiatement identifié comme un vrai croyant … et encore, on courrait toujours le risque d’apparaître déviant : chaque religion avait ses fous de Dieu, qui se lançaient dans des guerres saintes particulièrement mortelles.

A côté les simples zones de non droit où fourmillaient malfaiteurs en tous genres pouvaient paraître comme plus « sûres » … relativement !

La désinformation régnait sur les médias sociaux, des recettes miracles contre les pandémies – Donald Trump n’avait-il pas ouvert la voie en suggérant des injections d’eau de Javel contre le Covid-19 ? – à la dénonciation d’individus malveillants, soupçonnés d’avoir facilité la dissémination des virus.

Son GPS indiquait les lieux à éviter, un peu comme jadis les radars : Niels suivait les indications à la lettre, multipliant les détours.

Il avait soigneusement évité Fontainebleau, repère de catholiques ultras réputés intransigeants et dangereux, les forêts du Gâtinais et ses coupe-jarrets, les villages entre Nemours et Montargis, extrêmement risqués – mais il ne savait plus trop pourquoi – pour se retrouver à Saint-Amand, supposée aux mains des djihadistes …

C’était juste une Fake News, il aurait dû s’en douter ; et il déjeuna paisiblement dans vieux routier à la sortie de la ville. Il avait encore 5 à 6 heures de route, et le Millevaches à traverser, aussi ne s’attarda-t-il pas trop à table ; et comme il en avait plus qu’assez de perdre son temps pour rien, il décida de ne plus tenir compte des alertes de son GPS.

Il traversa Guéret – repère intégriste, attention ! –, Bourganeuf – repère djihadiste, attention ! –, avant de s’enfoncer dans le Millevaches, pour s’octroyer une petite pause au bord du lac de Vassivière dont d’ordinaire – ou plutôt jadis – les bords attiraient des nuées de touristes ; mais aujourd’hui, quel calme !

Il se gara près du Sentier des Poètes, pour une courte balade à pieds, histoire de se dégourdir les jambes : certes sur son GPS clignotait un gros panneau de danger, mais il décida de ne pas en tenir plus compte que tous les précédents.

Fatale erreur : car en perturbant une transaction entre trafiquants de drogues et dealers, il devenait un témoin gênant ; et en ces temps et lieux de non-droit, la vie des témoins gênants ne valaient pas grand-chose.

Il pensa que tout n’était pas nécessairement des Fake News sur les médias sociaux et ailleurs …

Fatale erreur !

Tags:
Pas de commentaires

Réagissez !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.