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À l’ouest, et partout ailleurs, toujours rien de nouveau #3

3ème épisode de ma contribution à L’Horrificque Disputatio, ouvrage collectif des Mardis du Luxembourg.


Petit flashback incertain

L’annonce d’un confinement général de la population le 16 mars avait surpris les Français : quelques jours auparavant on se gaussait encore – très – discrètement des Italiens après s’être plus ouvertement moqué des Chinois – des populations encore primitives, surtout dans les campagnes où l’on se nourrissait de toutes les bêbêtes qu’on avait sous la main.

On naviguait – ou plutôt nos gouvernants naviguaient – en plein brouillard, et on nous bombardait de consignes contradictoires : des masques, non surtout pas de masques, mais si des masques ; grosse grippette ou catastrophe planétaire ?

Avec pour seule certitude, après le confinement, le bout du tunnel … ou pas … mais enfin, on pouvait espérer, y croire.

Mais il y avait comme une sorte d’élan national : tous unis contre la maladie bien sûr, mais aussi vers une meilleure société qui allait nécessairement se construire dans ce que l’on nommait déjà … le monde d’après.

Problème, c’est que de longs mois après – et après une période estivale de semi insouciance – le monde d’après, on n’en voyait pas le début d’un commencement … sinon dans les discussions philosophiques du coin du feu !

Bref, on s’engluait dans la pandémie … mais bon, on avait un ennemi commun et même si on découvrait – mais était-ce une totale surprise – que l’on n’avait pas de bons généraux, on espérait bien un jour « gagner la guerre » : après tout, on avait bien gagné les dernières – enfin, les mondiales, pas les coloniales.

On avait le bon droit pour soi … même si franchement, que pèse le « bon droit » face à un coronavirus ?

On faisait corps, même si la belle union nationale réclamée par les stratèges se dépiautait chaque jour un peu plus … quand un autre état d’urgence est revenu frapper à la porte – ou plutôt, nous est revenu en pleine figure comme un boomerang avec l’assassinat d’un professeur d’histoire à Conflans Sainte-Honorine.

Avec le procès des complices des attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, et l’agression au hachoir près des anciens locaux du journal, on avait bien un peu replongé dans la vague d’horreur de 2015 – mais tout cela, c’était du passé, un problème à la fois !

Et voilà que tout se mélangeait : état d’urgence d’hier, devenu permanent parce que désormais inscrit dans la loi ordinaire, et nouvel état d’urgence sanitaire, on avait la tête sous l’eau, on vivait dans la confusion totale. Et dans les médias, l’attentat de Conflans « effaçait » le Covid-19, avant que le Covid-19 et son couvre-feu « n’efface » à nouveau l’attentat de Conflans.

Un auteur me revient à l’esprit – ou plutôt le titre d’une de ses dernières pièces : Ce formidable bordel !, d’Eugène Ionesco – et si finalement tout ça n’était qu’une énorme farce ?

Peu à peu le monde – notre monde –, hier si simple s’enfonçait dans l’incertain ; du temps de Marx, l’histoire avait un sens – comme le résumait le Manifeste du parti communiste – avec la victoire du prolétariat comme seule issue ; puis vinrent les Trente Glorieuses, et sa flèche barométrique pointant désormais vers un inéluctable progrès, technologique et sociétal …

« No future » braillaient les Sex Pistols : on y est désormais, et plus aucune divinité ne sauvera la reine.

Plus besoin de critiquer la raison pure ou la raison pratique : plus aucune raison ne dirige désormais le monde ; d’ailleurs « La raison, c’est la folie du plus fort. La raison du moins fort, c’est de la folie », nous rappelait le même Eugène dans son Journal en Miettes

Où va-t-on ? Nul ne sait, mais un peu partout à la fois sans doute. Non, on ne sait plus vraiment où l’on va, mais on y va, c’est certain, on y courre … quoi qu’il y en ait qui s’arrêtent, d’autres mêmes qui reculent.

Intermède musical

Le monde délire, c’est certain … et il arrive un moment où l’on se sent incapable d’illustrer ce que l’on ressent avec des mots ; j’ai glissé çà et là au creux de ces lignes quelques images pour préciser mes sentiments, des images glanées au cours de pérégrinations.

Au cours de pérégrinations … car il fut une époque où l’on pouvait voyager sans contraintes aux quatre coins de la planète – ou presque : restait encore la Corée du Nord et quelques zones de conflits qu’il fallait mieux éviter.

Mais on pouvait visiter les Pyramides de Gizeh, les temples d’Angkor, les chutes du Zambèze, sauter par-dessus le Mur de Berlin : tout cela sans grandes formalités, sans avoir à attendre un hypothétique visa politique ou sanitaire !

Aujourd’hui, ces photos ne suffisent plus à exprimer quelque détresse – même ces magnifiques rosaces de squelettes, en provenance de l’église de San Francisco, à Lima.

J’éprouve comme une sensation d’insécurité, de froid – d’angoisse ; me reviennent les paroles d’une vieille chanson de Pink Floyd, Astronomy Domine[1], composée par Syd Barrett – le guitariste improbable, capable de passer un concert entier à ne jouer qu’un accord …

Comme s’il avait d’autres mondes en tête, s’il vivait d’autres vies en parallèle : Syd Barrett, le 1er musicien quantique ?

Lime and limpid green, a second scene
Now fights between the blue you once knew
Floating down, the sound resounds
Around the icy waters underground
Jupiter and Saturn, Oberon, Miranda and Titania
Neptune, Titan, stars can frighten

Il est temps d’effectuer un – petit … ou pas ? – bon en avant, et de nous replonger dans la France de l’après. D’après la 5ème pandémie.

Et pour cette période, je n’ai plus aucune chanson pour l’illustrer !


[1] Les bienheureux qui liront la version électronique de ce livre n’auront qu’à cliquer sur le lien pour écouter Astronomy Domine, la version originale de The Piper At The Gates Of Dawn ; pour la version papier, il suffit de scanner le QR Code qui sui les paroles.

Respecter le consommateur, avec Frank Rosenthal

Respecter le consommateur : le Club Horizon(s) de l’Adetem invitait récemment 3 experts à s’exprimer sur le sujet lors d’un Webinar ; retour sur cette matinée avec Frank RosenthalRetail Distribution.

MarketingIsDead : Pour le marketer, le consommateur reste bien souvent juste une cible : cette posture est-elle encore tenable aujourd’hui ?

Frank Rosenthal : Non, c’est une posture qui est intenable. Les choses sont beaucoup plus complexes que la seule approche de cible. D’abord parce que les comportements varient beaucoup d’un secteur à l’autre, d’une enseigne à l’autre, d’une période à l’autre, d’une marque à une autre marque et même sur le même consommateur il existe bien souvent de multiples paradoxes.

On voit d’ailleurs la grande différence sur les études quantitatives avec du déclaratif quand le consommateur se place en citoyen, par exemple sur l’alimentaire, il vous dit vouloir consommer massivement des produits bios et locaux et quand on regarde la réalité observée scrupuleusement par les différents panélistes, on mesure des écarts énormes. Le marketer ne peut donc pas considérer uniquement le consommateur comme une cible.

Il faut multiplier les sources, études, interrogations clients et non clients pour se faire une conviction. Le travail du marketer ne peut pas donc être le même qu’auparavant. Je répète souvent à mes clients qu’il faut considérer les 4 dimensions de l’individu :

  1. L’être humain, ses valeurs, ses peurs, ses projets…
  2. Le citoyen son pays, sa région, son département, sa ville, l’avenir de la planète,
  3. Le consommateur, ses besoins, ses envies, ses possibilités de consommer, ses habitudes,
  4. Le shopper, ses nouvelles habitudes d’achat, les circuits et canaux qu’il fréquente …

Tout est devenu plus complexe. Le marketing doit évoluer. Le marketer aussi.

MarketingIsDead : Pour les distributeurs, par où passe la voix du respect des consommateurs ?

Frank Rosenthal : D’abord, on ne le dit pas assez, mais il passe par ce qui est obligatoire, le respect de la loi. Et la loi fixe énormément d’obligations aux distributeurs physiques, digitaux ou les 2. Dans la réunion du Club Horizon, j’ai donné quelques chiffres : ces dix dernières années, ce sont le code de la consommation (+ 94% de mots), celui du commerce (+ 81%) et celui de l’environnement (+ 59%). qui ont pris le plus de volume. Donc partons du principe que les obligations que subissent les distributeurs sont actuellement énormes.

Mais, pour autant, de son positionnement (avec le respect des promesses), jusqu’à l’information produits, en passant par les efforts du personnel en magasin ou encore la réactivité et la résolution du problème par les SAV et ce n’est pas exhaustif, le respect du consommateur doit être partout, sur tout le parcours client. Les distributeurs peuvent d’ailleurs étudier la mise en œuvre de plan de bataille sur ce fameux « respect du consommateur » et ils peuvent se donner une priorité : la réactivité et l’efficacité du service client. Quand on voit le succès d’Amazon sur ce plan, cela devrait servir d’inspiration.

MarketingIsDead : C’est qui le patron ?, Darty : comment ces marques ont-elles su intégrer la notion de respect dans leur relation à leurs clients ?

Frank Rosenthal : Pour C’est qui le patron ?, la marque est née de ce respect du consommateur, tout est fait par eux et pour eux. Le cahier des charges leur permet de choisir les différents items qui vont influer le prix du produit. Et le consommateur en fonction de ses propres choix, voit le prix varier. Cela le responsabilise et lui permet de faire des choix crédibles. La démarche participative n’est pas nouvelle, mais sa généralisation permet de réconcilier totalement citoyen et consommateur. Une démarche marketing formidable. Le même consommateur sera ensuite cohérent quand il sera exposé aux produits de la marque dans les magasins.

Pour Darty, rappelons son histoire bâtie sur le Contrat de Confiance, une des plus belles idées marketing de la distribution. Avec le contrat de confiance, on a affaire à un oxymore et c’est intéressant. Pour remettre au goût du jour, le contrat de confiance, Darty propose son assistance avec un abonnement même sur des produits qui ne sont pas achetés chez Darty. La durabilité qui est un sujet crucial sur le gros électroménager est intégrée avec des indicateurs qui permettent de choisir son appareil en fonction de sa durabilité, de l’engagement sur la durée de trouver des pièces disponibles. Intéressant car cela donne des réponses simples et identifiables à tous ceux qui disent vouloir changer leur comportement et qui ont les moyens de le faire.