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Quelques nouvelles du front avec Hervé Kabla

Vient de paraître aux éditions Kawa Le confinement expliqué à mon boss ; rencontre avec son initiateur Hervé Kabla.

MarketingIsDead : Pourquoi un tel livre alors qu’on parle déjà de déconfinement ?

Hervé Kabla : Déconfinement, vraiment ? je ne suis pas si optimiste. Quand le gouvernement parle du 11 mai, quand on rentre dans les détails, on se rend compte qu’il y aura peu d’entreprises qui pourront effectivement sortir du confinement. Le livre restera d’actualité, parce que je pense que de nombreuses entreprises auront encore à réfléchir à l’impact du confinement.

Ce livre est né d’une série de questions, que je me suis posées dès la première semaine de confinement, comme de nombreux autres chefs d’entreprise et de patrons d’agence. Comment allons-nous fonctionner ? Quel va être l’impact sur les équipes ? Et sur les clients ? Pourrons-nous poursuivre notre activité commerciale ? Comment organiser un télétravail à grande échelle, alors que les enfants seront aussi à la maison avec leurs parents.

Un des patrons de mes agences partenaires, Benoit Raoult, dirige une agence à Shanghai. Autrement dit, en terme d’activité pendant le confinement, il disposait de 2 mois d’avances sur nous. En l’écoutant nous conseiller, je me suis dit qu’il y avait matière à écrire un livre pour aider les chefs d’entreprise pendant cette période particulière. J’ai contacté les éditions Kawa pour leur proposer le projet. Ils ont immédiatement suivi. J’ai embarqué 7 autres auteurs de la collection des livres expliqués à mon boss et c’était parti ! Le livre a été écrit en 10 jours, entre le 22 et le 31 mars, et est sorti officiellement le 6 avril.

Un dernier point : il était hors de question de gagner le moindre centime sur ce projet. Les revenus du livre seront intégralement reversés à la Fondation de France, dans le fond destiné au support des personnels de santé.

MarketingIsDead : Qui sont les auteurs ?

Hervé Kabla : Nous sommes huit auteurs, certains avaient déjà écrit dans la collection « à mon boss », comme Sylvie Lachkar, auteur du Social selling, Pierre Blanc, auteur de l’IA, ou Tiphaine Mayolle, auteur de La parentalité. Bien sûr, mon acolyte et alter ego Yann Gourvennec s’est totalement impliqué. Trois nouveaux auteurs nous ont rejoint : Emmanuelle Hervé, experte en communication de crise, Bertrand Duperrin, expert des RH et du digital et auteur de l’excellent blog Duperrin ) et Xavier de Mazenod, expert du télétravail.

Par ailleurs, nous avons interviewé des chefs d’entreprise avec des avis variés sur la posture à adopter face au confinement : Serge Delwasse (Cetrac), Manuel Diaz (eMakina), Clarisse Berrebi (cabinet Bolt), Philippe Grimminger (Flexsi) ou Christian Béghyn (Exos).

MarketingIsDead : Pourquoi ce livre intéresse-t-il les marketers ?

Hervé Kabla : Dans la phase difficile que nous traversons, il est important de jouer sur deux axes sur lesquels le marketing est fondamental : communiquer vis à vis des clients, préparer le futur.

Les clients, nos clients, sont dans le même pétrin que nous. Ils se demandent si leurs fournisseurs tiendront la route, si eux-mêmes auront la capacité à rebondir, ils attendent que nous leur parlions, sans leur mentir. Ces échanges seront fondamentaux. Les marques qui ne sauront pas communiquer pendant cette crise et qui continuerons de faire comme si de rien n’était, sans empathie, se trompent de combat. C’est, nous l’expliquons très tôt, l’une des priorités de l’entreprise confinée.

Préparer le futur a toujours été une des préoccupations des marketers. Anticiper les changements, identifier les besoins actuels et à venir, cela fait aussi partie de leur périmètre. C’est l’autre priorité à laquelle doivent s’atteler les marketeurs. Certaines entreprises vont devoir pivoter très rapidement. C’est faisable, il ne faut pas en avoir peur. D’autres doivent penser à imaginer de nouvelles offres, de nouveaux produits, sous peine de disparaître. Le digital devient, on le constate chaque jour, à coups de visioconférences et d’achats en ligne, non seulement essentiel, mais fondamental.

Bref, le confinement expliqué à mon boss est un livre qui vous concerne tous. Et en vous le procurant, vous ferez une bonne action.

L’aventure au coin de la ride

Danielle Rapoport vient de publier L’aventure au coin de la ride ; rencontre avec l’auteure, sociologue, consultante, conférencière … et membre du Comité Scientifique de l’Adetem.

MarketingIsDead : S’il fallait résumer en quelques lignes L’aventure au coin de la ride, c’est quoi le propos de ton livre ?

Danielle Rapoport : Ce livre est un parcours de ce que représente le vieillissement, à plusieurs étapes de la vie de femmes et des hommes interrogé(e)s, et de mon propre vécu, croisé aux théories empruntant aux sciences humaines – psycho/socio/philosophie – et aux neurosciences.

J’y différencie le cheminement du « vieillir », ses changements, ses crises et résiliences, de ce qu’est « être vieux ». A cet apport pluridisciplinaire de femmes et d’hommes de l’art, s’ajoutent des anecdotes, et quatre grandes thématiques sont abordées : le rapport au temps, aux peurs, à son corps et au corps de l’autre, et le « marketing du vieillissement ».

Un des objectifs de l’ouvrage est de contribuer à casser les tabous et le cercle vicieux de la dépréciation de soi et du regard social sur le vieillissement et les changements qui jalonnent l’avancée en âge. Il s’agit là de décloisonner, de réconcilier dans leurs représentations et leur vécu jeunes et vieux, passé présent, futur, dans une volonté de « bientraitance » individuelle et collective. Retrouver et sauvegarder l’enfance en soi et ce jusqu’à la fin est un credo qui devrait soutenir l’avancée en âge. En soi, vieillir devient une aventure, car s’ouvrent des chemins inédits et insoupçonnés, par des choix concertés pour cette seconde et nouvelle vie.

MarketingIsDead : En quoi vieillir aujourd’hui est-il si différent de vieillir au siècle dernier ?

Danielle Rapoport : Il faut replacer le vieillissement dans le contexte sociétal de l’époque. Aujourd’hui, jeunisme et stigmatisation des différences se conjuguent au diktat de l’apparence, de l’agilité, de la vitesse, du présentisme. Avec en toile de fond un paradoxe intéressant : la projection plutôt délétère dans l’avenir et un réel allongement de l’espérance de vie.

Il faut donc interroger la place des vieillissants, celle qu’on leur permet et celle qu’ils prendront. S’ils n’ont pas le même rapport au temps que les plus jeunes, ils doivent trouver le sens qu’ils donneront aux vingt ou trente années qu’il leur restent à vivre après leur retraite, grâce aux progrès de la science et de la médecine.  Cette invention du « temps qui reste » est en soi une aventure, un « travail » dans le sens noble du terme ! Notons aussi les inégalités en fonction des conditions de vie, des niveaux socioculturels et de l’accès (décryptage) à l’information et aux soins. De plus, le souci de l’autre, des plus âgés, est rendu difficile par l’habitat urbain, où contrairement aux campagnes où les « vieux », même solitaires, ont leur place, ceux qui villes sont souvent isolés.

Au siècle dernier, la course à la jeunesse n’était pas aussi prégnante, moins portée par les rouages de la consommation et les avancées scientifiques. Les familles étaient plus structurées, deux ou trois générations vivant souvent sous un même toit. Les aînés y jouaient un rôle important, reconnu, n’étaient pas stigmatisés, et s’intégraient de manière évidente dans l’ensemble familial moins éclaté qu’aujourd’hui. Il faut dire que l’espérance de vie était bien plus courte. A l’heure actuelle, quatre ou cinq générations se disséminent aux quatre coins du monde. Et le virtuel, s’il joue un rôle majeur de lien, ne remplace pas le lien plus charnel, notamment avec ses grands-parents.

Il faut rajouter, contrairement au siècle dernier, les spécifiés et difficultés de la « génération pivot », qui se situe entre des parents dont il faut prendre soin et des enfant, même adultes, à soutenir matériellement.

MarketingIsDead : A qui profitent les vieux ? … c’est quoi, le « marketing du vieillissement » ?

Danielle Rapoport : J’ai utilisé ce concept en regard d’un article que j’avais publié dans La Croix sur le « marketing de la peur ». C’est simple : toute peur demande « réparation » par une solution réelle ou magique, définissable et crédible par la promesse qui en est faite d’agir comme antidote. Un quasi remède à la peur grâce à tel objet, action, aliment etc.

Vieillir peut faire peur aujourd’hui, par ses signes extérieurs – perte de sa beauté, séduction, de sa virilité etc. –  par les risques perçus liés à la maladie et à plus ou moins long terme à la dépendance.

Peur aussi d’être exclu de « là où ça se passe », y compris du monde du travail, quand autour de la cinquantaine vous êtes « mis en quarantaine » des employeurs et des recruteurs du fait de la concurrence des plus jeunes. Le vieillissement, surtout s’il n’est pas  qualifié (recevoir des publicités pour monte-escalier quand on est en grande forme !) « profite » financièrement à tous ceux qui proposent ces antidotes pour rajeunir ou conserver sa jeunesse, et qui ont d’ailleurs imaginé cette appellation valorisante de « seniors » pour ne pas dire « vieux ». Antidotes via la cosmétologie, la médecine, la chirurgie esthétique, le sport et ses injonctions de bouger plus – ce qui en soi n’est pas un mal sauf si ces règles sont culpabilisantes pour les plus paresseux ! –, l’alimentaire et ses multiples et incessantes innovations censées prolonger notre espérance de vie ou éviter telles maladies. Cela profite aussi aux donneurs de recettes et aux coachs, qui traitent du vieillissement  là encore comme une maladie à réparer, voire à éradiquer pour les plus extrêmes des transhumanistes.

L’idéologie actuelle du bien-être et du bonheurisme font leurs choux gras grâce aux personnes rendues plus vulnérables non seulement par leur avancée en âge, mais aussi par le regard social qui, peu ou prou, rejette le fait même de vieillir, et bien sûr de mourir !

A rajouter là encore les inégalités repérées entre celles et ceux qui savent, qui assument, qui réparent, et jouent à leur manière la carte du mieux vieillir en fonction de leur savoir, de leur pouvoir d’achat, de leurs désirs … et les autres.

MarketingIsDead : Le Covid 19 va-t-il changer notre rapport au vieillissement ?

Danielle Rapoport : Très étrange et complexe cette problématique, car j’y vois un maelström émotionnel et de représentations, dans une vision ambivalente, à la fois délétère et compassionnelle, de ces « vieux » malmenés par ce virus, et qui questionne notre propre rapport au vieillissement et à celui de nos proches.

Le Covid-19 fait mourir plus majoritairement les plus âgés, ce qui en soi est vrai, mais au plan communicationnel, le vieillissement se transformerait en catégorie, case, en cage (cf. les confinés des Ehpad) dans lesquelles quiconque âgé de plus de 75 ans serait vouée à l’arrêt de soins intensifs au profit de ceux dont l’espérance de vie est plus grande. Mais si les vieux payent le prix fort de cette infection, croisée au manque de moyens matériels et humains, c’est aussi du fait  de leurs polypathologies. Ce qui relativise le propos, si tant est que le « tri » s’effectue plutôt en fonction de la vaillance des corps que du seul critère légal de l’âge.

Le rapport à son propre vieillissement risque néanmoins d’être fragilisé. On peut supposer des attitudes de prévention renforcées, de protection. Ou à l’inverse des postures de déni, de rejet encore plus fort de la maladie et de la mort qui « n’arrivent qu’aux autres », par ceux qui se sentent, du fait de leur jeunesse, en soi-disante invulnérabilité. On le voit dans la transgression des gestes barrière, où la séparation d’avec les plus âgés n’est que plus affirmée.

Mais aussi d’autres modalités relationnelles. La compassion et la souffrance mettent en marche la solidarité des familles, renforcée par celle des institutions, du politique et des entreprises. Nombre de liens initiés par voix et image réunissent virtuellement les familles éclatées, où il faut préserver les plus vieux tout en se préservant soi-même. Ambivalence, d’un côté le souci du « care », de l’autre, celui de la survie individuelle.

Quand le virus aura fini sa partie, il y aura tant de choses à repenser, qu’il faudra prendre en compte le vécu de ces aînés qui ont survécu, qui ont eu peur parfois, qui auront à nous apprendre, notamment dans notre rapport à la mort jusqu’aujourd’hui bien occultée. Mais là, les chiffres égrenés du nombre de malades et de morts nous rappellent que nous sommes mortels.

Cette crise dans laquelle nous sommes est parsemée d’inconnues. Elle nous changera peut-être, se teintera d’oubli ou au contraire s’enrichira de liens intergénérationnels redécouverts, d’un rapport à soi différent, où la vulnérabilité fera la part du factice et de l’essentiel. Chacun devra y trouver la partition de son propre vieillissement.