Demain l’assurance Archives - Marketing is Dead
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Demain l’assurance

Les Français, leurs budgets et les marques #2

2nde partie de ma contribution au livre blanc : Imaginer l’assurance de demain, publié par le Think Tank Demain l’assurance, téléchargeable ici.

Et les grands perdants sont … les marques !

Face à une telle situation, bon nombre de consommateurs font développer des réactions d’adaptation, voire de survie : comment préserver – ou retrouver – du pouvoir d’achat quand parfois on a l’impression que tout prend l’eau ?

En se ruant sur ce qui est gratuit – on peut encore accéder à des tas de contenus gratuit sur la toile, légalement ou pas – ou moins cher : d’où le succès du low coast dans les transports, de sites comme Booking dans l’hôtellerie, des comparateurs de prix, notamment dans l’assurance … et des promotions diverses et variées, jusqu’à la démesure du Black Friday et autres Cyber Monday.

Avec des offres « Jusqu’à – 70% » qui pullulent sur les sites Web et dans les vitrine des magasins … et les clients de s’interroger sur le « vrai » prix d’un téléphone, d’un téléviseur, d’un réfrigérateur : ils n’ont plus vraiment l’impression de faire de bonnes affaires pendant d’ultra courtes périodes mais plutôt d’en faire de mauvaises tout le reste de l’année …

… sauf qu’ils vont également découvrir que pendant que même pendant ces courtes périodes ils en font surtout de mauvaises : car, comme le souligne l’UFC Que Choisir, non seulement « la part de produits faisant l’objet d’une vraie promotion à l’occasion du Black Friday est faible », mais « l’ampleur des ristournes est plus que limitée ».[1]

D’où une perte accrue de confiance dans les marques et les distributeurs, tous secteurs confondus : chaque épisode d’une série comme Les marques nous mentent-elles ? du Youtubeur Le Tatou cartonne entre 2 et 3 millions de vues !

Autre tactique d’adaptation ou de survie dans un univers de pauvreté accrue : se passer des entreprises ou des marques, avec des plateformes comme AirBnB ou BlaBlaCar : je me fais un complément de revenus en louant mon appartement ou je paie mon cher mes déplacement en partageant la voiture d’un parfait inconnu.

Comment être sûr que le logement que je vais louer pour mes vacances à l’autre bout du monde sera de qualité ; ou que le chauffeur avec qui je vais voyager ne conduit pas dangereusement ? Simplement en me référant aux avis laissés par ceux qui m’ont précédé : des gens dont j’ignore tout, mais en qui je vais malgré tout avoir confiance.

Et ce sont lesdits « tiers de confiance » comme les nomme désormais les marketers qui vont assurer le rôle auparavant dévolu aux marques : servir de repères aux consommateurs ! Pierre plus sûr qu’Ibis, et Paul plus rassurant que la SNCF !

Dès lors, que reste-t-il aux marques ?

Pour certains, elles ne sont plus qu’objets de moquerie, voire de défoulement : le trolling se développe sur les réseaux sociaux … et tout est bon pour faire rire les autres socionautes, comme ce voyageur qui interpelle la SNCF sur Twitter : « Je suis à bord du train qui va à Lyon et je fraude ».

Certains spécialistes des médias sociaux admire le talents de certains community managers capables de répondre du tac au tac, dans le ton : mais franchement, le futur du branding, est-ce de payer de tels communicants pour « assurer » face à des socionautes qui se moquent ouvertement des marques ?

A moins qu’à une époque où bien des consommateurs ont du mal à gagner leur pain quotidien, il ne faille leur offrir des jeux ?


[1] Que Choisir : Black Friday 2019.

Les Français, leurs budgets et les marques #1

1ère partie de ma contribution au livre blanc : Imaginer l’assurance de demain, publié par le Think Tank Demain l’assurance, téléchargeable ici.

Les inégalités, ce ne sont pas que des chiffres !

Selon une étude réalisée par le Centre Kantar sur le Futur de l’Europe[1], pour les Français – mais aussi les Allemands – « les inégalités sont un problème majeur : respectivement 38% et 37% », contre seulement « 16% en Grande-Bretagne » : des chiffres qui interrogent … surtout le dernier pour qui a déjà vu les films de Ken Loach.

D’autant que le coefficient de Gini[2] montre que « les inégalités sont relativement faibles en 2016 en France (0,293), en Allemagne (0,295) » mais « légèrement supérieures (c’est-à-dire très modérées) en Grande-Bretagne (0,315) » : bref, les Anglais, moins égalitaires que les Français, ne se soucieraient pas vraiment des inégalités !

Inégalités qui renverraient donc en fait à deux réalités, l’une financière, l’autre psychologique, l’une nourrissant l’autre … mais pas seulement.

Revenons à l’année 2016 et penchons nous sur le niveau de vie moyen des Français, tel que mesuré par l’Insee – ce dernier correspond au « revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation », une unité « étant attribuée au premier adulte, 0,5 aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 aux enfants de moins de 14 ans » … ouf !

Donc ce niveau de vie moyen s’élevait à 23 580 € en 2016, soit 1 965 € mensuels.

L’Insee divise la population en 10 déciles, le 1er correspondant aux 10% de Français ayant le plus faible niveau de vie et le dernier, les 10% bénéficiant du niveau le plus élevé, soit 8 380 € pour les uns contre 56 230 € pour les autres.

Soit encore 698 € par mois versus 4 686 € et un rapport de 1 à 6,71 : imaginez un instant une personne seule vivant moins de 700 € mensuels … même pas en rêve à Paris, vu le coût des loyers.

698 € par mois pour les 10% de Français les plus pauvres, versus 4 686 € pour les 10% les plus riches … et 8 850 € pour le 1% le plus riche (106 210 € par an) – soit un rapport de 1 à 12,67 : les inégalités ne sont pas que psychologiques !

La part du revenu national détenue par ce 1% le plus riche s’élevait à 10,8% en 2014 contre 7,5% 30 ans plus tôt en 1984 ; pour retrouver ce même niveau de 10,8%, il faut remonter à nouveau 20 ans en arrière, en 1964.[3]

Globalement, les inégalités se sont réduites en France durant les Trente Glorieuses pour se recreuser à partir des années 80 : le rapport de 1 à 6,71 entre le 1er et le dernier décile précédemment évoqué n’était encore que 6,19 en 2001 – pas sûr que tout cela aille dans le sens égalitaire.

D’autant que les plus pauvres doivent faire face à des charges de plus en plus élevées.

Ainsi la part des dépenses pré-engagées – celles qu’un ménage ne peut éviter à moins de se retrouver SDF puisque le logement y occupe la majeure part, devant les assurances et les télécoms – a-t-elle grimpé de 12,3% à 29,1% de 1959 à 2013 !

Surtout, ces dépenses ne touchent pas pareillement tous nos concitoyens : elles représentent 56% des dépenses d’un couple avec un enfant pour les 25% des Français les plus pauvres contre seulement 24% pour les 25% les plus riches ; surtout elles sautent à 65% pour une famille monoparentale et 71% pour une personne seul pour les 25% les plus pauvres : il ne reste pas grand-chose pour se faire plaisir … surtout qu’alimentation, vêtements, essence ne sont pas inclus dans ces fameuses dépenses pré-engagées.

Et c’est même là que le financier rejoint le psychologique et que vont pouvoir éclater des crises comme celle des Gilets Jaunes.


[1] Centre Kantar sur le Futur de l’Europe, 18 Septembre 2018.

[2] Coefficient très prisé des économistes bien qu’également très critiqué :

Le Gini, ça peut faire Pschitt !

[3] Source : Garbinti, Goupille-Lebret, Piketty, 2017, cités par Alternatives économiques.